Calvados 1968

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Cet inventaire est le résultat d'une exposition virtuelle réalisée en 2008 par Emmanuelle Amsellem à l'occasion du cinquantième anniversaire des évènements de mail 1968.

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Cette campagne d'enregistrement a été réalisée en prévision du cinquantenaire des évènements de mai 68, au premier semestre 2018. Elle a été initiée par un appel à témoignage relayé dans le Journal du Calvados. Elle était volontairement resserée sur le témoignage de femmes ouvrières pour compléter les travaux déjà réalisés, notamment par Jean Quellien.

Les témoignages de Jean Quellien, Louis Mexandeau et François Neveux dépassent bien entendu le seul cadre de l'année 68 pour retracer l'ensemble de leur carrière politique ou universitaire.

Marie-Thérèse Desclosayes, opératrice à La Poste à Lisieux

Cote/Cotes extrêmes

7AV/22

Modalités d'entrées

Enregistrement réalisé au domicile de Mme Desclosayes par Julie Deslondes, le 1er février 2018 dans le cadre d'un appel à collecte fait dans le Journal du Calvados.

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Mme Desclosayes avait 19 ans en mai 68. Elle était alors opératrice au centre téléphonique de la Poste à Lisieux. Elle a vécu les évènements au sein d'une famille militante, son père était syndicaliste CGT à Ernault Somua, et sympathisant communiste.

Elle évoque son père, le milieu ouvrier de Lisieux, une grande grève à Lisieux, l'ambiance à La Poste, les réunions à la maison du Peuple de Lisieux, la solidarité entre les ouvriers grévistes, son exaltation et ses souvenirs heureux de ces moments décrits comme "bon enfant" à quelques exceptions près.

Son témoignage oral suit un témoignage écrit reçu par mail, livré ci-dessous in-extenso :

"Bonjour, pour faire suite à votre appel à témoins j' avais envie de partager ces quelques souvenirs encore très présents dans ma mémoire car j 'avais 19 ans à l'époque. Je travaillais comme auxiliaire au central téléphonique de Lisieux, certaines personnes avaient été réquisitionnées car il fallait assurer le fonctionnement du standard téléphonique seul moyen pour obtenir les secours notamment. Mon père qui était délégué syndical C.G.T. à l' usine  Hernaut somua [sic] (grand pourvoyeur d' emplois à cette époque) était très actif et j'allais avec lui à la maison du peuple, on y retrouvait tous les copains délégués de toutes les usines du coin La Somua, knoor dhall, Pien et Glasson, Nestlé, les usines de confection comme Novotex etc...à cette époque les usines étaient nombreuses. Le défilé a été historique, je n'avais jamais vu une telle foule, les commerçants avaient peur ils avaient baissé leurs rideaux, je revois encore notre boucher un couteau à la main qui semblait inquiet. Une de nos collègues, non gréviste, avait voulu forcer le barrage à l' entrée de la cour Matignon, j' ai bien cru qu' elle allait être frappée car elle avait failli renverser plusieurs grévistes, et à un autre moment alors que nous défilions dans les rues ,un gars  en estafette a foncé au travers de la foule et plusieurs personnes ont couru pour l' intercepter, là encore j' ai eu très peur que ça finisse par de la violence. Des délégués récoltaient des fonds, de la nourriture, sur le marché, Place Thiers, pour aider les familles les plus démunies à tenir le coup financièrement car la grève a duré pas loin d'un mois et il faut bien manger. Mes parents avaient gagné une somme relativement importante, au tiercé, grâce aux numéros donnés par une voyante passée au domicile de mes parents pour vendre des napperons. Cela représentait 3 ou 4 mois de salaires , un miracle pour mes parents qui étaient très modestes,et de ce fait ceux ci  ont refusé l' argent du pot commun  car ils estimaient que certaines familles en avaient un besoin urgent pour manger, et eux ont utilisé cette manne tombée du ciel. Il y a eu une grande solidarité du mouvement ouvrier c' est du moins tel que je l' ai ressenti et une telle ferveur lors des défilés surtout  quand nous avons terminé la marche devant la mairie. Je me revois encore avec le bel ensemble bleu ciel que ma mère m' avait acheté grâce au tiercé, car à cette époque là nous portions la même jupe toute l' année, lavée le dimanche et de nouveau opérationnelle le lundi, alors je ne vous dis pas ma fierté d' arborer un tel "joyau" que de souvenirs ! Dieu merci chez nous à Lisieux il n' y a pas eu de violences comme à Paris mais beaucoup craignaient les débordements. Est ce le fait d' avoir 19 ans mais j' en garde un excellent souvenir, nous étions tous en communion, je me  sentait portée peut-être était ce dû aussi au fait que mon père nous faisait vibrer de l' intérieur, aujourd'hui c' est du chacun pour soi dans le monde du travail seuls de grands événements comme les attentats arrivent  à rassembler les gens avec une telle ferveur. Voilà ma petite contribution qui ne vous sera peut être pas utile mais qui m' aura fait faire un petit retour sur le passé".

 

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