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Jean Gohin

Mézidon, 1922 - Caen, 2019

Jean Gohin est en tenue militaire et porte un béret.
Jean Gohin, [hiver 1944-1945], Collection particulière

Jean Gohin est né à Mézidon le 10 avril 1922 où ses parents tiennent une quincaillerie. Son père est une "gueule cassée" de la Première Guerre mondiale. Après des études primaires à Mézidon, il intègre le lycée Malherbe où il obtient son baccalauréat en juin 1940. Il commence alors des études vétérinaires.

Il refuse de se conformer à la loi du 16 février 1943 qui met en place le Service du travail obligatoire (STO) : il interrompt ses études et se cache chez un agriculteur du Bény-Bocage qui l'emploie comme ouvrier agricole. 

C'est là qu'il fait la connaissance du responsable de l'Organisation civile et militaire (OCM) du secteur, Jean Romain Corsaut. A partir du printemps 1943, il agit dans le bocage virois pour le compte de l'OCM et de son réseau de renseignement Centurie, comme porteur de messages et interprète auprès d’aviateurs alliés. 

Ce témoignage indique notamment : "J'entrais donc en 1943 dans l'OCM sous les ordres de M. Corson responsable EDF du canton et fus aussitôt chargé de plusieurs missions notamment : contacts avec le maquis de Vassy qui disposait d'un poste émetteur, repérage des diverses troupes allemandes dans la région et surtout je servais d'interprète pour tous les aviateurs dont l'avion avait été abattu car je parlais bien l'anglais et l'allemand première et deuxième langue au baccalauréat. Ces aviateurs étaient ensuite aussitôt regroupés et pris en charge par d'autres résistants et renvoyés en Angleterre soit par bateau mais plus souvent dirigés vers l'Espagne où une puissante organisation les prenaient en charge. Les contacts se faisaient de nuit pour ne pas mettre en danger ceux qui les avaient recueillis et m'obligeaient souvent à traverser la forêt dense dans cette région seul bien sûr, et très angoissant au début."

Témoignage manuscrit de Jean Gohin, s. d., AD14, 59J/199

Quelques jours après le Débarquement, Jean Gohin rejoint Caen à la demande de Serge Goguel, étudiant en médecine et proche de Léonard Gille. Il effectue de nombreuses missions de liaison entre les résistants caennais, bientôt regroupés dans la Compagnie FFI Scamaroni et les groupes de réisistance répartis dans tout le département et notamment le maquis de Saint-Clair dirigé par Jean Renaud-Dandicolle.

Dans la nuit du 3 au 4 juillet 1944, il est volontaire avec quatre camarades FFI pour saboter une passerelle en bois, permettant de franchir l'Orne au niveau de Fleury-sur-Orne et protégée par une batterie de DCA. Elle a été construite par les Allemands pour remplacer les ponts de Caen détruits par l'aviation alliée. 

Le 9 juillet 1944, soit 2 jours après le lancement de l'opération Charnwood, les soldats du Royal Ulster Rifles entrent dans Caen par le  nord. Les régiments canadiens et britanniques libèrent la rive gauche.  Le soir du 9 juillet 1944, une manifestation improvisée se tient place Monseigneur-des-Hameaux au pied de l'église Saint-Étienne. C'est Jean Gohin qui est choisi pour hisser le drapeau français orné d'une croix de Lorraine. 

Il est écrit : " Le lendemain, 9 juillet, les Alliés, principalement des Anglais et des canadiens libéraient Caen Nord  chassant tous les Allemands de cette zone occupée. Léonard Gille réunit tous les résistants présents et les personnalités locales place monseigneur des hameaux et on ressortit un drapeau bleu blanc rouge qui avait été confectionné par des résistantes et ce fut le lever des couleurs que l'on commémore tous les ans le 9 juillet à la même heure. Quelques officiers Alliés qu'avaient avisés les opérateurs y assistaient. Nous avons appris que la passerelle de Fleury avait bien été rendue inutilisable empêchant tout retrait des troupes allemandes. Pointleue me demanda de hisser le drapeau avec un autre résistant et ce fut un moment inoubliable car tout le monde chantait la Marseillaise."

Témoignage manuscrit de Jean Gohin, s. d., AD14, 59J/199

Le 1er août 1944, Jean Gohin et Charles Huard sont volontaires pour une mission de renseignement de trois semaines organisée par les services de renseignement britanniques : la mission Koenig.

Jean Gohin y figure comme faisant partie des sous-officiers. Le mot mission en rouge a été ajouté à la main à côté de son nom.

Composition de la Compagnie Scamaroni au 30 juillet 1944, Jean Gohin apparaît dans les sous-officiers. Le terme mission fait référence à la mission Koenig, AD14, 59J/178.

A la fin de sa mission, Jean Gohin rejoint le BCRA et suit les troupes anglaises jusqu’à Lille. Il est ensuite intégré à la DGER, à Paris, jusqu’à la fin de la guerre. Il est décoré de la croix de guerre 1939-1945 avec étoile de bronze et cité à l'ordre de la brigade par le général Koenig.

Pour Jean Gohin, il est écrit : "Sergent des FFI animé d'un grand courage et d'un beau sang-froid. Volontaire pour les missions périlleuses, a accompli les 16 et 17 juillet 1944 une reconnaissance en profondeur au travers des lignes ennemies; a assuré la liaison avec les éléments de la Résistance de l'Intérieur rapportant des renseignements d'une grande importance militaire."

Extrait du journal Liberté de Normandie, 6 octobre 1944, AD14, 13T/1/174

Après la guerre, il s'investit dans les associations du monde combattant. Il décède en 2019 et avec lui disparaît le dernier membre de la Compagnie Scamaroni.

Bibliographie

  • Neveu Cédric, «Jean Gohin», in Association Résistance et Mémoire, La Résistance dans le Calvados, cédérom éd. AERI, 2004
  • Quellien, Jean, Opinions et comportements politiques dans le Calvados sous l'occupation Allemande (1940-1944), Caen, Presses universitaires de Caen, 2001, AD14, BH/8/11055

Sources d'archives

Archives du Calvados

  • Témoignages manuscrits de Jean Gohin, s. d., 59J/199
  • Composition de la Compagnie Scamaroni au 30 juillet 1944, 59J/178
  • Témoignage audiovisuel de Serge Goguel, enregistré en 1994, 2AV/52

Service historique de la Défense

  • Vincennes : dossier individuel de résistant, GR 16 P 261516 et dossier individuel d'agent de la France combattante, GR 28P 4 433/59

Pour aller plus loin :

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