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Le Calvados et le cheval
En 1749, Georges-Louis Buffon écrivait dans son Histoire naturelle des animaux à propos du cheval: "La plus noble conquête que l'homme ait jamais faite est celle de ce fier et fougueux animal, qui partage avec lui les fatigues de la guerre et la gloire des combats." Mais cette conquête semble à considérer dans une dimension de réciprocité. Ne serait-ce pas ainsi le cheval qui a conquis l'Homme par ses facultés exceptionnelles. C'est alors l'ensemble des territoires qui ont été marqués par le développement d'une véritable civilisation hippomobile dont l'apogée est atteinte au XIXème siècle.
Et le Calvados ne fait pas figure d'exception, mieux, il cultive son identité associée aux liens entre les Hommes et les chevaux. Avant même l'existence du Département, le cheval faisait déjà partie intégrante de la culture locale et drainait une activité économique importante.
Chevaux de bataille
![Statue équestre de Guillaume le Conquérant à Falaise, tirage sur papier, 16 x 12, 5 cm [fin XIXème siècle], AD14, 2FI/345/1](/images/c567eaf6-db61-46d0-b8a7-cd0a01899744_2_column.jpeg)
Lors de la bataille de Hastings, en 1066, la cavalerie
normande fait la différence face aux armées anglaises exclusivement composées de fantassins. La tapisserie de
Bayeux fait figurer plus de deux cents chevaux et la stature de
Guillaume-le-Conquérant est incontestablement liée à la
puissance de sa cavalerie. Symbole des batailles mythiques du Moyen Âge, le cheval est aussi un outil essentiel de conflits
plus contemporains et considérablement plus meurtriers. Les équidés font l’objet d’un recensement par les mairies en vue de réquisition en cas de conflit armé. Les dépôts de remonte sont créés pour assurer un approvisionnement suffisant en temps de guerre.
Le premier s’installe à titre expérimental à Caen en 1818 dans le quartier de la Visitation. Treize ans plus tard, le corps de remonte est étendu au niveau national mais celui de Caen est le plus grand de France. Son ressort s’étend sur le Calvados, l’Eure et la Seine-Maritime et comprend deux succursales : Falaise et le Bec-Hellouin. Durant la Première Guerre mondiale, la plupart des chevaux sont utilisés pour tracter l’artillerie et seulement dix pour cent sont employés par la cavalerie. Les chevaux assurent également le ravitaillement des troupes, le
transport des soldats…
Une civilisation hippomobile
À partir du XVIe et jusqu’au XVIIIe siècle, les populations urbaines, de plus en plus nombreuses, ont des besoins croissants en nourriture, matières premières et sources d’énergie. Inversement, les villes produisent des marchandises qu’elles doivent expédier vers l’extérieur. Le cheval est l’artisan de ces nouveaux échanges entre villes et campagnes par le biais de l’attelage et de la voiture. Cette civilisation hippomobile dure jusqu’au développement des chemins de fer et le paroxysme de la présence équine en ville est atteint au début du XIXe siècle. Le cheval a participé à la construction d’un paysage urbain caractéristique.
Miser sur le bon cheval
La mode des courses de galop est venue d’Angleterre dans la seconde moitié du XVIIIe siècle et gagne l’aristocratie française. Interrompues à la Révolution, les courses de galop reprennent sous l’Empire et se développent sous les régimes suivants.
Dans le Calvados, les premières courses hippiques se déroulent à la Prairie de Caen les 26 et 27 août 1837 sous l’impulsion de la Société Royale d’Agriculture et de Commerce. Son but est alors de relever l’industrie chevaline qui constitue l’une des plus importantes sources de prospérité de la région. En août 1864, l’hippodrome de Deauville est inauguré par le duc de Morny. L’installation fonde alors l’identité de la toute nouvelle cité balnéaire. Celle-ci organise en parallèle, à partir de 1887, la vente de poulains de l’année. Dans son sillage, les champs de courses se multiplient dans le département : Pont-l’Évêque en 1875, Vire en 1880, Courseulles-sur-Mer en 1882, Livarot en 1888 ou encore Lisieux en 1889. Cet engouement draine des sommes financières considérables. Les ventes de yearlings, ne cessent d’atteindre de nouveaux records : alors qu’un futur crack pouvait être adjugé autour de cinquante mille francs dans les années 1900, les sommes dépassent aujourd'hui le million d’euros. Le Calvados a vu naître de grands champions, notamment des trotteurs légendaires dont Ourasi, quadruple vainqueur du Prix d'Amérique.
Une force de cheval
![Paysans et travail des champs, tirage d'une photographie de Robert Desauney (1905-1988), photographe à Condé-sur-Noireau [années 1950] AD14, 82FI/3](/images/8d185a75-ce24-4195-9fa6-c7d9e61093fb_2_column.jpg)
Dans les domaines agricoles et industriels, le cheval de trait est
un acteur bien présent jusque dans les années 1960. Il appartient au domaine des animaux de travail par opposition aux animaux de rente qui produisent de la viande, du lait ou des oeufs. Pour les travaux des champs, le cheptel est composé de bêtes de trait lourd et de sujets plus légers pour tirer à bonne allure la carriole. L’évolution du machinisme agricole nécessite par la suite le perfectionnement des races pour insuffler davantage de force. L’Augeron est ainsi développé au début du XXe siècle à partir du Percheron. Au sein de l’entreprise, le cheval apparaît aussi bien comme un acteur vivant que comme partie intégrante du patrimoine matériel avec tous ses équipements : écuries, harnais, attelage... Dans le Calvados, il n’est pas utilisé dans les mines de charbon car les galeries sont trop basses. En revanche, les chevaux de trait sont utilisés pour les manèges, pour faire tourner les treuils et rouler les berlines.
Pour aller plus loin
Collection « Les archives inédites du Calvados » - 2014 – 80 p. avec ill. en couleur – 29,7 x 21 cm – poids : 380 g Prix : 2,50 €