Les dentellières

La dentelle est un savoir-faire normand particulièrement reconnu. Le savoir-faire de la dentelle au point d'Alençon est même inscrit sur la liste représentative du Patrimoine Culturel Immatériel de l'Humanité de l'UNESCO depuis 2010. Dans le Calvados, c'est à Bayeux, Courseulles et Caen que les dentellières ont déployé leurs talents !
Historique sur le site du conservatoire de la dentelle de Bayeux
La dentelle aux fuseaux est apparue à Bayeux et dans sa région avec l’arrivée des sœurs de la Providence à la demande de Mgr François de Nesmond, dans la seconde moitié du XVIIème siècle. À la fin de ce siècle, on fait état de trois manufactures de dentelles à Bayeux : St Malo, l’Hôpital-Général et la Charité. Au XVIIIème siècle, la fabrication de la dentelle aux fuseaux se développe et des fabricants s’installent à Bayeux (Sr Guyard puis Sr Clément…).
Au début du XIXème siècle, à Bayeux, les fabricants importants sont : Tardif (successeur de Clément) et Jean-Delamare avec Mme Carpentier (sa sœur) qui deviendra fabricante de dentelles de S.A.R. Madame la Dauphine. En 1829, elle cède sa fabrique à M. Augustin René Lefébure qui continuera à la développer, à réorganiser et à relancer toutes les prestigieuses dentelles normandes aussi bien dans le domaine des dentelles aux fuseaux (« Blonde de Caen », « Chantilly », « Dentelle de Bayeux », …) que dans le domaine des dentelles à l’aiguille (« Point Colbert », « Point d’Alençon », …).
En 1867, il transmet la direction de sa maison à ses fils Ernest et Anatole qui poursuivront son œuvre. On leur doit notamment la renaissance du « Point d’Argentan » en dentelle à l’aiguille. Au XXème siècle, c’est la disparition des dernières activités économiques de la dentelle de Bayeux, à partir des années 1950. Seule subsiste jusque dans les années 1970, l’école de dentelle de Bayeux animée par une ancienne maîtresse dentellière, Madame Friteau (Meilleur Ouvrier de France 1955).
La dentelle dite « de Bayeux » est une dentelle réalisée aux fuseaux. La dentelle aux fuseaux est répandue de la Haute à la Basse-Normandie, avec une concentration déterminante dans la région de Caen et de Bayeux, plus dynamique tant au plan de la création dentellière que de l’importance des manufactures qui ont fait sa réputation internationale. Les matières employées sont le lin, la soie, et plus tard le coton, surtout en période de crise d’approvisionnement.
La dentelle à l’aiguille originaire d’Italie fit son apparition en Normandie sous Colbert (ministre des finances du roi Louis XIV) avec la création de manufactures Royales notamment à Argentan. À l’époque Empire, la mousseline, la dentelle de soie et blonde prennent de plus en plus de place, ce qui entraîna l’anéantissement quasi complet de la dentelle à l’aiguille. Mais sous le Second Empire, la fabrication de la dentelle à l’aiguille fut retrouvée à Bayeux au sein de la maison Lefébure qui excella dans le genre point de Venise appelé « le Point Colbert », en hommage au ministre de Louis XIV.
Evolution d'une dentelle prestigieuse, la "blonde de Caen"

En s'installant à Caen en 1624, les Ursulines (religieuses) enseignent la dentelle au fuseau. Elles utilisent surtout le fil de lin. A la fin du XVIIe, on voit apparaître dans la région les dentelles de soie qui porteront d'abord le nom de Nankin, région de Chine qui produit la soie. Au début, ce n'est qu'un tulle à mailles larges mais sa teinte particulière, plus brillante que celle du lin, lui vaudra le nom de blonde. Très vite, Caen, qui en produit une grande quantité et fabrique les plus belles, lui ajoutera son nom, donnant naissance à la blonde de Caen, une dentelle souple et légère que l'on fabrique, non seulement en Normandie, mais aussi au Puy en Velay, en Suisse et ailleurs... L'encyclopédie de Diderot et D'Alembert décrit fort bien les blondes et les affuble de noms évocateurs : La chenille (brin de chenille à la place du cordon), le persil (motifs très petits), la couleuvre, le pouce du roi ...
Vers 1750, Caen compte 18 fabricants. Ils seront 102 en 1850. Mais ce sera le début du déclin de la blonde au profit des dentelles de soie noires qui seront à la mode sous le règne de Napoléon III et d'Eugénie.